LA VIE SPIRITUELLE/LA PENTECOTE PERSONNELLE

Publié le par Père Jean-Pierre

LA VIE SPIRITUELLE

Le fondement de notre vie dans le Christ est le baptême. Quand nous recevons ce sacrement, nous obtenons la grâce du Saint-Esprit. Elle répand en nous une lumière et une force intérieures qui nous rendent capables de rompre avec le mal, de repousser les tentations de l'égoïsme, de l'esprit de jouissance et de domination. C'est en ce sens que le baptême nous fait mourir au péché et ressusciter avec le Christ pour une vie nouvelle.
Mais le baptême ne nous communique pas cette vie nouvelle dans son état achevé, dans sa pleine maturité. Il nous en donne seulement le germe, et cette semence déposée dans nos cœurs ne peut croître et se développer que si nous y apportons librement notre concours.
Le baptême laisse subsister en nous un attrait pour les plaisirs et les satisfactions égoïstes. Il faut donc que, en écoutant la Parole de Dieu telle qu'elle nous est transmise dans l'Eglise et en suppliant dans la prière le Seigneur de nous venir en aide, nous fassions violence à nos tendances mauvaises pour obéir à ce que Dieu nous demande, même si nous n'en ressentons ni le goût, ni l'envie.
En effet, à ce stade de la vie spirituelle, nous ne pouvons pas encore avoir conscience de cette vie nouvelle qui nous habite, nous ne pouvons pas encore éprouver d'une façon sensible le goût du bien, l'attrait pour les choses d'en haut. L'éveil de cette " sensibilité spirituelle " est un don que Dieu n'accorde ordinairement qu'à ceux qui ont longuement mené le " combat invisible ". En attendant, seule la foi en la Parole de Dieu nous permet de connaître avec certitude ce qui est bien et ce qui est mal, et la grâce nous vient en aide d'une façon réelle, mais que nous ne " sentons " pas.
Nous ne sommes d'ailleurs pas laissés à nous-mêmes dans notre compréhension de la Parole de Dieu. Ce n'est pas en effet ce que nous comprenons par nous-mêmes, ce que nous ressentons, ce qui nous convient ou nous semble bon, ce avec quoi nous nous sentons à l'aise, qui est nécessairement vrai et bien. La vérité ne se révèle qu'à ceux qui sont unis dans l'amour, à ceux qui n'ont ensemble qu'un seul cœur et un seul esprit dans le Christ. En d'autres termes, c'est l'Eglise seule qui peut comprendre la Parole de son Seigneur, dans la lumière de l'Esprit-Saint. Lorsque tous les chrétiens, pendant des siècles et dans les lieux les plus divers, ont compris la Parole de Dieu d'une certaine façon et en ont interprété les exigences d'une manière déterminée, cette unanimité est le signe que l'Esprit-Saint est à l'œuvre, que cette compréhension de la Parole donnée à l'Eglise vient de lui. S'en écarter pour suivre son opinion propre, ou celle d'un groupe particulier, serait pécher contre l'amour, ce serait ce qu'on a appelé un " fratricide spirituel ".
Ne croyons pas qu'il puisse y avoir, au sein du peuple de Dieu, une " évolution des mœurs " qui rendrait dépassé et périmé ce qui a été tenu " par tous, toujours et partout " dans l'Eglise. Quand il s'agit de points aussi fondamentaux que, par exemple, la nécessité de la prière, le sens du jeûne, la conception chrétienne du mariage et de la vie sexuelle, le respect absolu et l'amour de toute personne humaine, impliquant le refus de l'avortement, de l'euthanasie, du racisme, il y a simplement des comportements qui sont chrétiens, et des comportements qui ne le sont pas, même s'ils sont devenus ceux d'un plus ou moins grand nombre de gens qui se disent ou se croient chrétiens. Le christianisme ne connaît ni interdits ni " tabous " arbitraires ; mais il y a une manière de vivre qui correspond au germe de vie divine reçu au baptême, qui en procède et l'aide à se développer, et une manière de vivre qui le tue.
Le chrétien, certes, reste un pécheur. Mais au péché, il existe un remède : le repentir. Si nous reconnaissons notre péché, si nous le regrettons du fond du coeur, si nous implorons le pardon divin, si nous nous efforçons sincèrement de nous convertir, Dieu nous viendra en aide et nous pardonnera. Mais si nous essayons de nous justifier,, si nous appelons le mal " bien ", et le bien " mal ", nous nous fermons par là même au repentir, nous commettons le péché contre l'Esprit.
Dans l'Eglise, il n'y a pas de différence entre la " morale " et la " spiritualité ", il n'y a pas un minimum imposé à tous, et des exigences supérieures qui seraient le privilège d'une élite. C'est à tous que le Seigneur a dit : " Soyez parfaits comme votre Père céleste est parfait ". Le plein développement de notre vie de fils de Dieu et de membres du Christ, commencée au baptême, est la loi de toute vie chrétienne. Ce n'est pas une loi qui s'imposerait de l'extérieur, un loi écrite sur des tables de pierre comme celle qui fut donnée à Moïse , c'est une loi inscrite dans nos cœurs par l'Esprit d'amour qui nous a été donné. Dans une certaine mesure, les moyens à mettre en oeuvre varient pour chacun, selon son état de vie et les conditions particulières qui sont les siennes; mais le but est le même pour tous : être transfigurés, par la puissance du Saint-Esprit, à l'image du Fils unique.

Archimandrite Placide DESEILLE

 

LA PENTECOTE PERSONNELLE
" CHRISTIFICATION " DES FIDELES

" Vous tous qui avez été baptisés en Christ, vous avez revêtu le Christ ", chantons-nous à chaque baptême, en citant Saint Paul dans son Epître aux Galates (3, 27). La vie chrétienne, ou plutôt, pour parler comme Saint Paul et comme Nicolas CAVASILAS (père de l'Eglise qui vivait au 14ème siècle), la vie en Christ ne consiste pas seulement à mettre en pratique les commandements de Dieu : ceci est demandé à un Juif et à un Musulman autant qu'à un Chrétien.
Il s'agit, en outre, il s'agit surtout, comme nous le rappelle St Paul dans l'Epitre aux Romains (6, 5), de devenir " une même plante ", "symphytoï " avec le Christ afin qu'Il demeure en nous et nous en Lui (Jean 6, 5 et 17, 23). " Je suis le cep, vous êtes les sarments " a dit le Christ Lui-même à ses disciples (Jean 15,5).
Cette intégration du chrétien au Corps du Christ se réalise par l'onction du Saint Esprit : " Vous possédez une onction (en grec " chrisma ") reçue du Saint (1, Jn 11, 20) ; " Celui qui nous affermit avec vous en Christ et qui nous donne l'onction (chrisma), c'est Dieu ". (2Cor. 1, 21)
Le mot grec " chrisma ", employé tant par Saint jean que par Saint Paul, renvoie aussitôt à " Christos " (en grec, " oint ") et nous rappelle que l'onction du Saint Esprit, le don du Saint Esprit, le don de Pentecôte nous intègre au Christ, nous unit au Christ, sur qui, en qui, repose l'onction du Saint Esprit, onction qui fait de Lui le " Oint " (" l'Esprit de Dieu est sur moi. Il m'a oint " - Il m'a fait Christ - " pour annoncer la Bonne Nouvelle aux pauvres " (Is. 61, 2). Le Christ fait don de cette même onction, de cette " chrismation " à ses disciples pour faire d'eux des " christoi ", des " oints ", des christs, des Chrétiens. C'est ce don que chacun de nous a commencé à recevoir en remontant des eaux du baptême lorsqu'il reçût le " sceau du don du Saint Esprit " dont nous avons été scellés par le Saint Chrême, par l'onction, par notre " chrismation ". Cette chrismation a donc marqué le début de notre Pentecôte personnelle, c'est-à-dire l'actualisation pour chacun de nous, la réception par chacun de nous aujourd'hui, du don fait à l'Eglise toute entière le jour de la Pentecôte.
Ce don, nous l'entretenons et le ranimons par la soif et l'espérance de toute une vie tendue vers cette " acquisition du Saint Esprit " qui, Saint Séraphin de Sarov nous le rappelle, en est le but même et lui donne tout son sens.
Nous l'entretenons et le ranimons en Eglise, chaque fois que nous participons sincèrement à la Divine Liturgie, chaque fois que nous communiant aux Saints Mystères, avec " crainte de Dieu, foi et amour ".
C'est, en effet, par la communion eucharistique que nous entrons en Christ et Lui en nous : " celui qui mange ma chair et boit mon sang demeure en Moi. et Moi en lui " (Jn 6, 56). Et c'est l'œuvre de l'Esprit qui change le pain et le vin en Corps et Sang du Christ afin de changer chacun de nous qui, en communiant, devient membre de ce même corps.
C'est ainsi que le Saint Esprit, en nous unissant corps et âme à Celui qui est " l'image du Dieu invisible " (Co. 1, 15), " le resplendissement de Sa gloire et l'empreinte de Sa substance " (Hb. 1, 3) rend de plus en plus brillante l'image de Dieu en chacun de nous, de sorte que " nous soyons transfigurés de gloire en gloire en cette même Image par le Seigneur qui est Esprit " (2Co. 3, 18), " jusqu'à ce que nous parvenions tous ensemble à l'unité dans la foi et dans la connaissance du Fils de Dieu, à l'état d'adultes, à la taille du Christ dans sa plénitude " (Ep 4, 13).
Croître en Christ, Image parfaite de Dieu, pour réaliser pleinement cette ressemblance selon laquelle nous avons été créés, tel est le but de la vie que nous pourrons atteindre dans la mesure où nous supplions sans cesse le Père d'insuffler en nous Son souffle, Son Saint Esprit, pour projeter en nous l'Image du Fils, nous rendre ainsi de plus en plus semblable à notre Divin modèle et ainsi " nous unir à la Divine Beauté " (kondakion du Dimanche de l'Orthodoxie), bref nous Christifier.

Père CYRILLE

Publié dans Enseignement

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