En Russie, les relations entre catholiques et orthodoxes s’améliorent Après une période tendue, la méfiance commence à tomber entre catholiques et orthodoxes MOSCOU De notre correspondant Dans la nef, guirlandes et sapins de Noël scintillent encore. Et Nadia Petrova, 40 ans, a la voix gaie et pleine d’espoir devant la porte de la cathédrale de l’Immaculée-Conception, principale église catholique de Moscou. « Les relations entre orthodoxes et catholiques sont aujourd’hui bien meilleures qu’avant ! Entre fidèles, il n’y a jamais eu vraiment de problèmes. Mais on sent que les tensions s’apaisent entre les hiérarchies… Nos évêques devraient d’ailleurs faire un effort pour moins se plaindre. Et les orthodoxes vont bientôt finir par autoriser une visite du pape à Moscou. Nous irons tous le fêter ! » À côté de Nadia, Artour Andreasian, 33ans, partage cet optimisme. De confession arménienne, il vient toutes les semaines à la messe de la cathédrale catholique. «J’aime cette église: je m’y sens bien et en liberté. Des orthodoxes viennent d’ailleurs aussi de temps en temps se joindre à la prière… On voit bien que leur regard sur les catholiques est en train de changer. Leur langage a aussi évolué. Ils critiquent moins, posent moins d’interdits. Nous devons tous comprendre qu’il y a un seul Dieu ! » Un message œcuménique qui devrait se concrétiser demain dans la cathédrale où catholiques et orthodoxes doivent se retrouver pour une prière commune. «On verra bien si le patriarcat participera à cette journée d’œcuménisme… », lance, avec un peu d’ironie dans la voix, le P. Iossif qui vient de célébrer la messe matinale. Avec lui, les vieilles tensions entre les deux Églises resurgissent. Rome a récemment nommé un nouvel archevêque catholique à Moscou, Mgr Tadeusz Kondrusiewicz, Biélorusse d’origine polonaise, cédant sa place à l’Italien Paolo Pezzi, aux origines donc moins provocatrices aux yeux de Moscou… Le patriarche Alexis II a d’ailleurs chaleureusement accueilli cette nomination et, lors de sa visite à Paris, il a déclaré qu’une rencontre avec Benoît XVI pourrait se réaliser « d’ici un an ou deux ». Mais il en faut plus pour convaincre le P. Iossif. « Depuis combien de temps disent-ils vouloir permettre cette rencontre ? Des mots ! Nous attendons les actes… Les orthodoxes devraient comprendre que nous ne devons pas nous battre mais nous rapprocher pour faire face aux menaces communes, comme celle des sectes. » Depuis la chute du communisme, les relations sont restées tendues entre le Saint-Siège et le patriarcat de Moscou qui accuse les catholiques de faire du prosélytisme en ex URSS. C’est pourquoi Jean-Paul II n’a jamais été autorisé à venir en Russie pour rencontrer les 600 000 catholiques du pays. Nombre d’entre eux soupçonnent toujours les orthodoxes d’entretenir une vieille jalousie devant la « puissance » du Saint-Siège. « Mais c’est un fait que les relations au sommet s’améliorent , insiste le P. Philarète, représentant de l’Église orthodoxe russe au Conseil de l’Europe. Les coopérations concrètes se multiplient, ainsi notre travail commun sur les questions de droits de l’homme. Il y a quatre ans, cette collaboration n’existait pas. » Dans la petite église orthodoxe voisine de la cathédrale de l’Immaculée-Conception, les fidèles tiennent des propos tout aussi apaisants. « Nous sommes tous frères et les hiérarchies des deux Églises devraient être suffisamment intelligentes pour le comprendre. Que le pape vienne et nous irons l’accueillir dans la joie ! », assure Sergueï Ermakov, 52 ans. « Une telle décision, c’est déjà de la politique… , ironise Alexandra Kuznetsova, 65 ans. Bien sûr nous devons prier ensemble. Mais, debout pendant plusieurs heures dans les églises, les orthodoxes ont un engagement religieux bien plus physique que les catholiques qui donnent l’impression d’entrer dans une cathédrale comme dans une salle de concert. » Une différence qui crée déjà une difficulté œcuménique… BENJAMIN QUÉNELLE DEMAIN: Le lobbying commun des Églises à Bruxelles. « Les coopérations concrètes se multiplient, ainsi notre travail commun sur les questions de droits de l’homme. » | |