La Sainte Semaine

Publié le par Père Jean-Pierre

 

Le Samedi de Lazare

Prélude de la Croix

 

 

« Ayant achevé la course des quarante jours…, nous demandons de voir la semaine sainte de ta Passion. »

C’est par ces mots des premières Vêpres du samedi avant les Rameaux, que le Carême se termine, et que nous entrons dans la commémoration annuelle des souffrances du Christ, de sa mort et de sa résurrection. Elle commence le samedi de Lazare. La fête de la Résurrection de Lazare, doublée de celle de l’entrée du Seigneur à Jérusalem, est appelée dans les textes liturgiques : « Prélude de la Croix ». Ce samedi de Lazare est célébré comme un dimanche, c’est-à-dire qu’on y fait l’office de la Résurrection. La joie qui résonne dans l’office souligne le thème principal : la victoire prochaine du Christ sur la mort. « La mort commence à trembler » ; c’est le début d’un duel décisif entre la vie et la mort, un duel qui nous donne la clé de tout le mystère de Pâques.

 

 

Le Dimanche des Rameaux

Hosanna

 

 

Du point de vue liturgique, le samedi de Lazare se présente comme l’avant-fête du dimanche des Palmes, jour où l’on célèbre l’entrée du Seigneur à Jérusalem. Ces deux fêtes ont un thème commun : le triomphe et la victoire. Le samedi a révélé l’Ennemi, qui est la mort, le dimanche annonce la victoire, le triomphe du Royaume de Dieu et l’acceptation par le monde de son seul Roi, Jésus-Christ.

 

 

Les lundi, mardi et mercredi

La fin

 

 

Ces trois jours, que l’Église appelle grands et saints, ont, à l’intérieur du déroulement liturgique de la sainte semaine, un but bien défini. Ils en situent les célébrations dans la perspective de la Fin. C’est pourquoi nous lisons les grands textes eschatologiques de Matthieu aux chapitres 24, 25 et 26. Le rôle des trois premiers jours de la semaine sainte est précisément de nous mettre en face du sens ultime de la Pâque, cet événement toujours efficient, qui révèle que notre monde, notre temps et notre vie sont à leur fin, et qui annonce le commencement de la vie nouvelle.

 

 

Le Jeudi Saint

La dernière Cène

 

 

Deux événements marquent la liturgie de ce jour : la dernière Cène du Christ et la trahison de Judas. L’un et l’autre trouvent leur sens dans l’amour. La dernière Cène est l’ultime révélation de l’amour rédempteur de Dieu pour l’homme, de l’amour en tant qu’essence même du salut. La trahison de Judas, elle, montre que le péché, la mort, la destruction de soi-même, proviennent aussi de l’amour, mais d’un amour défiguré, détourné de ce qui mérite vraiment d’être aimé. Tel est le mystère de ce jour unique dont la liturgie, imprégnée à la fois de lumière et de ténèbres, de joie et de douleur, nous met devant un choix décisif dont dépend la destinée éternelle de chacun de nous. À Matines, le tropaire donne le thème du jour : l’opposition entre l’amour du Christ et le désir insatiable de Judas. À Vêpres, les stichères soulignent l’autre pôle, tragique, de ce grand Jeudi, la trahison de Judas et nous place devant notre propre combat : « Il suivait son maître et, en lui-même, méditait sa trahison… »

 

 

Le Grand Vendredi

La croix

 

 

De la lumière du grand jeudi, nous passons aux ténèbres du Vendredi, le jour de la Passion du Christ, de sa mort et de sa sépulture. Pourtant ce jour du Mal, dont la manifestation et le triomphe sont à leur paroxysme, est aussi le jour de la Rédemption. La mort du Christ nous est révélé comme une mort salvifique pour nous. À Matines, les douze lectures du récit de la Passion nous font suivre pas à pas le Christ dans ses souffrances. À Vêpres, l’office de la descente de Croix, les lectures et les hymnes sont remplis de solennelles accusations contre ceux qui, volontairement et librement, ont décidé de tuer le Christ. Le deuxième aspect du mystère de ce jour est celui du sacrifice d’amour qui prépare la victoire finale. La lumière se fait de plus en plus vive et, en même temps, grandissent l’espérance et la certitude que la mort va être vaincue par la vie. L’image du Christ au tombeau reste au milieu de l’Église et chacun est invité à faire ce geste très riche symboliquement de passer sous la table sur laquelle repose la représentation du tombeau, c’est-à-dire à vivre ce passage de la mort à la Vie.

 

 

Le saint sabbat

 

 

Le Vendredi vient juste de se terminer, du point de vue liturgique. C’est pourquoi la tristesse du Vendredi est le thème initial, le point de départ des Matines du Samedi. Cet office commence comme un office des funérailles, une lamentation sur un mort. Nous sommes devant le tombeau de notre Seigneur, nous contemplons sa mort, sa défaite. Mais en réalité, cette défaite apparente se révèle être un duel. Les forces du mal semblent triompher ; le Juste est crucifié, abandonné de tous. Cependant le véritable sens de la descente de Jésus aux enfers est révélé dans un verset de la liturgie : « O Vie, comment peux-tu mourir ? Comment séjournes-tu au tombeau ? » Et la vie réponds alors : « Mais c’est pour détruire la puissance de la mort et ressusciter les morts de l’enfer. »

 

 

Les Vepres du Samedi Saint

 

 

 

Cet office commence par une composition originale : les Lamentations de l’enfer. L’enfer s’avoue vaincu : « Il eut mieux valu pour moi n’avoir pas accueilli le fils de Marie, car, en pénétrant dans mon domaine, il a mis fin à mon pouvoir… » Là s’exprime dans toute sa force la conception orientale du salut comme arrachement à la mort. La représentation iconographique traditionnelle de la Résurrection c’est la descente victorieuse du Christ aux enfers d’où il délivre Adam et Eve. Sur le modèle des fresques de saint Sauveur in Chora à Istanbul, on voit la force inouie du Christ qui tire de toutes ses forces nos premiers parents. La fin de ces Vepres qui comprennent la Divine Liturgie est marquée par ces fleurs que le pretre lance dans l’église pour signifier déjà la joie de cette victoire du Christ.

 

 

La Nuit Sainte

 

 

Après cette image de la descente victorieuse du Christ aux enfers, c’est l’image du tombeau vide que retient la tradition orientale. Cette joie annoncée résonne sur le parvis de l’église pour que tous puissent entendre. Tout éclate : les chants, la lumière, …Nous vivons désormais en Christ, car, comme le dit un verset : « Nous sommes passés du non-etre à l’etre. » Le péché qui nous sépare de la plénitude de la vie en Christ est vaincu. Symboliquement les portes de l’iconostase resteront ouvertes pour signifier cette communion parfaite que la Résurrection inaugure. Mais si cette victoire est acquise, dans son sens eschatologique, la Résurrection nous tourne vers un but que nous n’avons pas encore atteint.

Tous peuvent désormais feter cette victoire en se saluant pendant tout le temps pascal par cette belle formule. Christos voskrécé, na istina voskrécé ; Christ est ressuscité, il est vraiment ressuscité !

 

 

                                                                                    Sèbastien Courault 

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